Le bijou algérien authentique, un doigté et une richesse exceptionnels

Le bijou algérien authentique, un doigté et une richesse exceptionnels

ALGER – Le bijou algérien, au même titre que d’autres éléments du patrimoine national immatériel, dénote d’un savoir-faire et d’une richesse exceptionnels. Héritage séculaire, il est le fruit de multiples croisements et influences, que des mains savantes et des défenseurs de l’authenticité ont su préserver de l’altération et de l’effacement.

Depuis le 27 février dernier, une exposition intitulée “Le bijou algérien: identité et authenticité”, est visible au musée du Bardo à Alger et ce, jusqu’à fin avril. Elle donne à voir les principaux types de bijoux traditionnels, typiques des différentes régions du pays, remontant aux 19ème et 20ème siècles. En même temps qu’elle permet aux visiteurs d’apprécier la finesse et l’originalité d’un patrimoine ayant résisté aux aléas du temps et autres menaces de dépossession.

Du bijou kabyle émaillé et rehaussé de corail des Ath Yanni, aux articles sobres ciselés en relief des Aurès, en passant par ceux de l’Atlas saharien aux ornementations inspirées de la faune et de la flore locales, la panoplie de l’artisanat algérien est d’une diversité peu inégalée. D’or, d’argent ou de cuivre, les riches collections existantes renseignent sur le passage et le brassage d’antiques civilisations sur la terre Algérie.

“Dans le chapitre du bijou kabyle, on retrouve la technique de l’émail cloisonné (découpé) qui remonte à la haute antiquité et qui existait chez les Byzantins”, explique à l’APS la Commissaire de l’exposition, Sana Alleg, par ailleurs chargée de la collection bijou, poterie et céramique au sein dudit musée.

Et de citer, entre autres, les variétés de fibules (Idwirren) ornant les robes d’apparat des femmes kabyles, dont celles rehaussées de la technique décorative des pendeloques: “Les formes géométriques comme l’Oméga existent depuis la période néolithique, voire depuis au moins 8000 ans avant Jésus Christ et se trouvent également sur les articles de poterie “, ajoute-t-elle.

Dans le périmètre réservé aux bijoux chaouis en argent, l’on retrouve des colliers pectoraux, des pendants de tempes (Lamecharef, Tachouchent ou encore Dlabeche) ornés de pierres en pâte de verre, des colliers à plusieurs chainettes fines, des ceintures (Lahzam) de divers volumes et symboles, de longs colliers (Charka), des chevillières (Rdif) ou encore des diadèmes (Ledjbine).

“Les motifs décoratifs sont empruntés à la nature. On retrouve ainsi l’outarde, le serpent, le lézard, le coq, etc”, commente encore Mme Alleg, notant que “les bracelets sont appelés en fonction des techniques d’ornementation, à l’exemple de +Deg Hdjar+, en référence aux petits reliefs caractérisant ce bijou”.

Autre particularité observée, la présence des boites à amulettes (Harz), suspendus aux colliers, de diverses tailles et usitées en guise de talisman contre le mauvais œil, selon la croyance locale. Un élément, par ailleurs, largement porté pour le même dessein par les femmes autant que les hommes targuis, dans le Grand Sud.

La Commissaire de l’exposition indique, qu’entre autres accessoires accompagnant l’habit festif de cette population berbère, figure “Chemassa”, un collier descendant au menton et dont la forme arrondie rappelle le soleil. De même que Khelhal Eddah (chevillière appelée parallèlement en kabyle), des bracelets sertis de motifs animaliers, dont les œufs de poisson, des colliers aux motifs végétaux, des jugulaires à chainettes, la Khamssa (pendentifs en forme de main ou en allumettes), etc.

“Les stations de repos de l’Atlas saharien ont connu plusieurs influences et brassages, comme ceux de l’Afrique subsaharienne, d’où l’usage de pierres précieuses et semi-précieuses, ainsi que des matières comme le cuir pour la confection des bijoux”, fait encore savoir la conservatrice du patrimoine, notant que les femmes targuies, de rang noble, se parent de bijoux de prestige à l’instar du “Khoumeyssa”, un collier couvrant largement le buste.

Le bijou naili à l’honneur….

Conscient de la valeur inestimable que représente la bijouterie authentique, l’artisan bijoutier Belakhadr Chouli voue une passion infinie pour le patrimoine naili dont il est originaire. Natif de Djelfa, il collectionne depuis 4 décennies les plus anciennes et précieuses pièces, jusqu’à ne plus pouvoir les compter. Si bien qu’il détient un “trésor” qu’il expose fièrement dans diverses manifestations, mu par le souci de le faire connaitre et apprécier du public.

“Je suis attaché à chacune de ces pièces et je n’ai pu céder les plus vieilles d’entre elles même au prix fort ! “, explique-t-il, avant de montrer sa pièce fétiche, un collier à plusieurs chainettes vieux de plus d’un siècle, de même que d’autres pièces comme le “Khounag”, un collier à ras de cou doté de pendeloques en Khamssa, ou encore Taassiba ajusté sur le front, des Khalkhal torsadés, des Souar (bracelets), etc.

“Même si certaines pièces datent de 30 ou 40 ans seulement, leur fabrication répond aux mêmes techniques que les plus anciennes”, explique-t-il, précisant que ces dernières sont souvent le fruit de brassages multiples qui est “un phénomène naturel”. Pour autant, certains modèles demeurent “typiques à l’Algérie”, insiste-t-il.

C’est le cas du bijou typique en or de Tlemcen, Echedda, qui accompagne le costume nuptial classé patrimoine universel de l’humanité, souligne Sofiane Benmansour, jeune bijoutier ayant acquis de son père un art légué de génération à une autre. Ou encore des pièces d’orfèvrerie, propres à l’Est du pays, à l’instar de “Meskia”, un collier accompagnant la Gandoura, robe festive constantinoise.

Plus que de simples accessoires festifs, les bijoux traditionnels d’apparat renseignent, dans leurs formes et dimensions, sur le statut marital des femmes qui les portent ainsi que de leur rang social.

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Source : APS

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